« Jésus se retira et partit en barque pour un endroit désert, à l’écart.»
Mt 14,13
> Jésus, lui aussi, sait prendre des temps de « vacance(s) », c’est-à-dire de retraite, loin de l’agitation et du travail quotidien. Ici, on nous dit même qu’il part en barque.
> Contrairement à nos limousines-break extensibles quasiment à l’infini grâce aux galeries et remorques qu’on leur adjoint parfois, une barque est un véhicule qui ne permet pas d’emporter beaucoup de matériel. Jésus n’a ni portable, ni chargeur de téléphone, ni cahiers de vacances avec lui. Il se retire et donc n’emporte pas ce qui fait son quotidien.
> Au milieu de cet été, puissions-nous laisser de côté de que nous avons malgré tout pris avec nous en vacances mais qui nous rappelle indûment notre quotidien. Que ce temps de vacance(s), pour celles et ceux qui ont la chance de le prendre, soit vraiment une mise à l’écart, au désert.
« Le Royaume des cieux est comparable à un trésor qui était caché dans un champ et un homme […] achète ce champ. »
Matthieu 13, 44
> Jésus explique ce qu’est le Royaume de Dieu. Jésus est concis dans ces propos et, à la première lecture, je me sens plus intelligent et renseigné sur ce fameux Royaume. Mais, s’il me prend l’envie de transmettre cette information à quelque ami, il m’apparaît que rien ne va de soi dans cette explication :
Le Royaume de Dieu est comparable à un trésor. Les guides touristiques décrivent les lieux dont ils vantent les charmes par des mots qui nous projettent dans l’endroit au point de désirer y être. Mais ce Royaume est comme un trésor. Qui rêve d’être dans un coffre ? De plus ce trésor est caché. Il n’est pas visible d’emblée, mais il faut le chercher. Non seulement, il est caché mais il l’est dans un champ. Cette localisation implique de la ténacité pour le trouver, car chacun sait qu’un champ c’est grand !
Ma première clé de lecture est une parole de Jésus : Celui qui cherche trouve (Mt 7, 8). Logiquement donc l’homme trouve le trésor.
Les événements qui suivent sont étranges. Je découvre que l’homme cherche dans un champ qui ne lui appartient pas et qu’il est fourbe (il cache à nouveau le trésor). Sa découverte est si précieuse que l’homme est prêt à rompre les amarres avec son passé : il vend tout ce qu’il a. Ce qui m’indique que soit le champ était à vendre, soit l’homme est suffisamment persuasif pour convaincre le propriétaire de vendre son champ. Etrange aussi le fait que le Royaume de Dieu pourrait être à vendre !
Ma seconde clé de lecture est dans une prière de Jésus qui loue son Père de ce qu’il a caché ces choses aux sages et aux intelligents (Mt 11, 25).
Je réalise, alors, que le Royaume de Dieu est tellement autre chose que l’univers dans lequel je vis qu’il me sera impossible d’en saisir la réalité. Quelqu’un a-t-il déjà vu une perle si grande qu’elle serve de porte, ou de l’or si pur qu’il en soit transparent ? Le mystère du Royaume de Dieu est incompréhensible, mais une chose est sûre : il vaut la peine de le chercher !
« Non, en enlevant l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson. »
Mt 13,29-30a
> Pour faire écho à cette parabole du bon grain et de l’ivraie, voici le conte de l’arbre :
Dans un pays aride, fut autrefois un arbre prodigieux. Sur la plaine, on ne voyait que lui, largement déployé entre les blés malingres et le vaste ciel bleu. Personne ne savait son âge. On disait qu’il était aussi vieux que la Terre. Des femmes stériles venaient parfois le supplier de les rendre fécondes, des hommes en secret cherchaient auprès de lui des réponses à des questions inexprimables et les loups lui parlaient, certaines nuits sans lune, mais personne jamais ne goûtait à ses fruits.
Ils étaient pourtant magnifiques, si luisants et dorés, le long de ses branches maîtresses pareilles à deux bras offerts dans le feuillage qu’ils attiraient les mains et les bouches des enfants ignorants. Eux seuls osaient les désirer. On leur apprenait alors l’étrange et vieille vérité. La moitié de ces fruits était empoisonnée. Or, tous, bons ou mauvais, étaient d’aspect semblable. Des deux branches ouvertes en haut du tronc énorme l’une portait la mort, l’autre portait la vie, mais on ne savait laquelle nourrissait et laquelle tuait. Et donc on regardait mais on ne touchait pas.
Vint un été trop chaud, puis un automne sec, puis un hiver glacial. Neige et vent emportèrent les granges et les toits des bergeries. Les givres du printemps brûlèrent les bourgeons, et la famine envahit le pays. Seul, sur la plaine, l’arbre demeura imperturbable. Aucun de ses fruits n’avait péri. Malgré les froidures, ils étaient restés en aussi grand nombre que les étoiles du ciel. Les gens, voyant ce vieux père solitaire miraculeusement rescapé des bourrasques, s’approchèrent de lui, indécis et craintifs. Ils interrogèrent son feuillage. Ils n’en eurent pas de réponse. Ils se dirent alors qu’il leur fallait choisir entre le risque de tomber foudroyés, s’ils goûtaient aux merveilles dorées qui luisaient parmi les feuilles, et la certitude de mourir de faim, s’ils n’y goûtaient pas.
Comme ils se laissaient aller en discussions confuses, un homme dont le fils ne vivait plus qu’à peine osa soudain s’avancer d’un pas ferme. Sous la branche de droite, il fit halte, cueillit un fruit, ferma les yeux, le croqua et resta debout, le souffle bienheureux. Alors tous, à sa suite, se bousculèrent et se gorgèrent délicieusement des fruits sains de la branche de droite, qui repoussèrent aussitôt, à peine cueillis, parmi les verdures bruissantes. Les hommes s’en réjouirent infiniment. Huit jours durant, ils festoyèrent, riant de leurs effrois passés.
Ils savaient désormais où étaient les rejetons malfaisants de cet arbre : sur la branche de gauche. Ils la regardèrent d’abord d’un air de défi, puis leur vint une rancune haineuse. A cause de la peur qu’ils avaient eu d’elle ils avaient failli mourir de faim. Ils la jugèrent bientôt inutile que dangereuse. Un enfant étourdi pouvait, un jour, se prendre à des fruits pervers que rien ne distinguait des bons. Ils décidèrent donc de la couper au ras du tronc, ce qu’ils firent avec une joie vengeresse.
Le lendemain, tous les bons fruits de la branche de droite étaient tombés et pourrissaient dans la poussière. L’arbre amputé de sa moitié empoisonnée n’offrait plus au grand soleil qu’un feuillage racorni. Son écorce avait noirci. Les oiseaux l’avaient fui. Il était mort.
(Conte de l’Inde, Henri Gougaud, L’arbre d’amour et de sagesse, Ed. du Seuil)
> Quels sont les bons et les mauvais fruits dans ma vie ?
> Cette semaine, prenons le temps pour méditer sur les bons et mauvais fruits sur l’arbre de notre vie, sur leurs liens, et accueillons-les dans cette espérance que le moissonneur saura faire le tri quand viendra le temps.
« C’est pourquoi je leur parle en paraboles, parce qu’en voyant ils ne voient point, et qu’en entendant ils n’entendent ni ne comprennent »
(Matthieu 13,13)
> On peut être aveugles et sourds même si nos yeux et nos oreilles sont en bon état de fonctionnement !
Dans ce temps de vacances qui s’annonce, est ce que je vais m’agiter et me lamenter de tout ce qui, cette année, n’est pas possible à mettre sur pieds : grands voyages, billets d’avion pas encore remboursés…?
Ou bien vais-je me laisser déplacer intérieurement par la force des images et de la parabole que nous raconte ce temps?? La nature est si belle, tout a été semé pour nous par le grand Semeur…et il fait refleurir nos plus grands déserts intérieurs, ceux qui ont été forcés de s’isoler et de se protéger !
Bel été dans la grâce du Dieu qui a semé paroles et images pour que nos yeux et nos coeurs s’ouvrent !!
« Prenez sur vous mon joug, [… il] est facile à porter. »
(Matthieu 11,29-30)
> C’est en voyant l’image d’un joug qu’on prend vraiment conscience de l’ampleur de cette métaphore utilisée par le Christ. Il s’agit d’une grande pièce en bois, souvent massive, qui relie et attache ensemble deux animaux de trait du bétail, en général des bœuf (désolé pour la comparaison, pour les plaintes s’adresser à Jésus). Ainsi ils doivent marcher côte à côte et partagent le poids de l’attelage. La force de cette image c’est qu’il ne s’agit pas d’aller de l’avant avec notre seule force. Nous sommes appelés à marcher avec Jésus et trouver ensemble un rythme qui nous va, et le poids de ce que nous trainons derrière nous est porté à deux.
> Nous avons à porter des fardeaux, ils ne sont pas repris de nos épaules pour se volatiliser dans les airs. Mais nous ne sommes pas seuls ! Cette semaine, prenons conscience que Jésus est uni à nous d’une manière incroyable. Et le joug qui nous lie n’est pas pesant, n’est pas écrasant ! Demandons-lui en prière de nous montrer régulièrement qu’il marche avec nous et porte avec nous les fardeaux et qu’il nous aide à avancer par la force de son Esprit. Amen