> Souvent nous aimerions ôter le mal du monde. Le purifier. Le rendre parfaitement bon. Mais Jésus nous propose un autre chemin : celui d’accepter la présence du mal dans le monde et de Lui laisser, à Lui et à Lui seul, le soin de juger les cœurs. Car la mauvaise herbe est mélangée à la bonne semence. Le mal est mélangé au bien. Et nous dit la parabole, seulement lors de la moisson pourra-t-il faire le tri. Seul Dieu pourra juger les cœurs.
> Nous sommes donc appelés à semer, puis à laisser pousser. Laisser faire. Dans une attitude de non-jugement. Et laisser le Christ à sa juste place et nous à la nôtre d’êtres humains. Ce qui est, en vérité, loin d’être simple.
> Cette semaine, méditons nos jugements hâtifs pour les déposer dans les mains de Dieu. Et laisser Dieu agir.
« Non, en enlevant l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson. »
Mt 13,29-30a
> Pour faire écho à cette parabole du bon grain et de l’ivraie, voici le conte de l’arbre :
Dans un pays aride, fut autrefois un arbre prodigieux. Sur la plaine, on ne voyait que lui, largement déployé entre les blés malingres et le vaste ciel bleu. Personne ne savait son âge. On disait qu’il était aussi vieux que la Terre. Des femmes stériles venaient parfois le supplier de les rendre fécondes, des hommes en secret cherchaient auprès de lui des réponses à des questions inexprimables et les loups lui parlaient, certaines nuits sans lune, mais personne jamais ne goûtait à ses fruits.
Ils étaient pourtant magnifiques, si luisants et dorés, le long de ses branches maîtresses pareilles à deux bras offerts dans le feuillage qu’ils attiraient les mains et les bouches des enfants ignorants. Eux seuls osaient les désirer. On leur apprenait alors l’étrange et vieille vérité. La moitié de ces fruits était empoisonnée. Or, tous, bons ou mauvais, étaient d’aspect semblable. Des deux branches ouvertes en haut du tronc énorme l’une portait la mort, l’autre portait la vie, mais on ne savait laquelle nourrissait et laquelle tuait. Et donc on regardait mais on ne touchait pas.
Vint un été trop chaud, puis un automne sec, puis un hiver glacial. Neige et vent emportèrent les granges et les toits des bergeries. Les givres du printemps brûlèrent les bourgeons, et la famine envahit le pays. Seul, sur la plaine, l’arbre demeura imperturbable. Aucun de ses fruits n’avait péri. Malgré les froidures, ils étaient restés en aussi grand nombre que les étoiles du ciel. Les gens, voyant ce vieux père solitaire miraculeusement rescapé des bourrasques, s’approchèrent de lui, indécis et craintifs. Ils interrogèrent son feuillage. Ils n’en eurent pas de réponse. Ils se dirent alors qu’il leur fallait choisir entre le risque de tomber foudroyés, s’ils goûtaient aux merveilles dorées qui luisaient parmi les feuilles, et la certitude de mourir de faim, s’ils n’y goûtaient pas.
Comme ils se laissaient aller en discussions confuses, un homme dont le fils ne vivait plus qu’à peine osa soudain s’avancer d’un pas ferme. Sous la branche de droite, il fit halte, cueillit un fruit, ferma les yeux, le croqua et resta debout, le souffle bienheureux. Alors tous, à sa suite, se bousculèrent et se gorgèrent délicieusement des fruits sains de la branche de droite, qui repoussèrent aussitôt, à peine cueillis, parmi les verdures bruissantes. Les hommes s’en réjouirent infiniment. Huit jours durant, ils festoyèrent, riant de leurs effrois passés.
Ils savaient désormais où étaient les rejetons malfaisants de cet arbre : sur la branche de gauche. Ils la regardèrent d’abord d’un air de défi, puis leur vint une rancune haineuse. A cause de la peur qu’ils avaient eu d’elle ils avaient failli mourir de faim. Ils la jugèrent bientôt inutile que dangereuse. Un enfant étourdi pouvait, un jour, se prendre à des fruits pervers que rien ne distinguait des bons. Ils décidèrent donc de la couper au ras du tronc, ce qu’ils firent avec une joie vengeresse.
Le lendemain, tous les bons fruits de la branche de droite étaient tombés et pourrissaient dans la poussière. L’arbre amputé de sa moitié empoisonnée n’offrait plus au grand soleil qu’un feuillage racorni. Son écorce avait noirci. Les oiseaux l’avaient fui. Il était mort.
(Conte de l’Inde, Henri Gougaud, L’arbre d’amour et de sagesse, Ed. du Seuil)
> Quels sont les bons et les mauvais fruits dans ma vie ?
> Cette semaine, prenons le temps pour méditer sur les bons et mauvais fruits sur l’arbre de notre vie, sur leurs liens, et accueillons-les dans cette espérance que le moissonneur saura faire le tri quand viendra le temps.
« Il m’a dit tout ce que j’ai fait. » Aussi, lorsqu’ils furent arrivés près de Lui, les Samaritains le prièrent de demeurer parmi eux. Et Il y demeura deux jours.
Jean 4, 39b-40
> La joie de la révélation règne parmi les Samaritains. Une des leurs a puisé de l’eau pour LE Messie. Allons-nous aussi inviter Jésus et les assoiffées qui l’entourent ?
Comment vivre cette semaine prochaine sans partager l’eau, le sel et le pain, nourriture essentielle en période de Carême ? Malgré les signaux alarmistes autour de ce « virus » mondial, Jésus me demande de pratiquer l’hospitalité et la solidarité ; de ne pas me détourner des besoins de mes frères et sœurs dans l’épreuve.
La prudence est indispensable pour éviter de transmettre le mal mais restons unis dans le partage des biens matériels et spirituels et adorons ce Dieu qui s’est fait Homme jusqu’à nous demander à boire.
« Vous serez haïs de tous à cause de mon nom ; mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. C’est par votre persévérance que vous gagnerez la vie. » (Lc 21, 17-19)
> Aie confiance: tout ne se joue pas dans ce monde-ci, et notre regard limité sur la réalité ne saurait rendre compte de la réalité de Dieu et de son Royaume. Même la désunion, les trahisons, même la mort: rien de tout cela n’est la fin.
Pas un cheveu de ta tête ne sera perdu. Aie confiance et persévère, afin que tu restes un vivant jusqu’au bout, quelqu’un qui n’aura pas été piégé, asservi, anéanti par le mal.
Persévère dans ce lien au Christ qui te fait exister, cette confiance qu’aucune attitude humaine ne peut toucher le coeur de ton coeur et mettre en péril l’image de Dieu déposée en toi.
Persévère, face à ce qui t’effraye dans l’état du monde, en discernant ce que tu peux travailler, et en laissant le souci de ce qui t’échappe de toute manière.
« Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas. » Luc 13, 9
> Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus explique d’une certaine manière l’égalité face à la mort. Celui qui meurt dans un accident de la chute d’une tour ou bien celui sacrifié par les romains ne sont pas plus pêcheurs que les autres et ce n’est pas la foudre divine qui se serait abattue sur eux !
Mais Jésus nous dit par deux fois en 9 versets : « Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même ». Il y a donc une chose importante. Se convertir car nous ne savons ni le jour ni l’heure de notre passage au royaume de Dieu.
Sommes-nous victimes du manque d’informations ? Non car le maître a été convaincu par le vigneron de le laisser essayer à nouveau de prendre soin du figuier qui ne donne pas de fruits. Mais s’il n’en donne pas, il sera coupé.
Alors profitons de cette semaine pour nous rappeler notre entrée en Carême : Convertissez-vous et croyez en l’Evangile ; et même : Tu es poussière et tu retourneras à la poussière.
« Et, quand Judas eut pris la bouchée, Satan entra en lui. » (Mt 13,27)
> Pendant cette Semaine Sainte Jésus va traverser bien des souffrances. Et derrière la faiblesse des hommes se cache celui nommé ici : Satan. La force du mal sur terre est puissante, jusqu’à mener à la mort du Christ. Prendre conscience de l’existence du mal c’est déjà prendre conscience qu’on peut lutter contre lui.
En ce mardi saint, alors que dans quelques jours nous vivrons la Passion de Jésus, nous pouvons décider de chercher à résolument repousser Satan, à refuser le Mal fermement.